Le Marché Bio de Saignelégier a des ailes


La 31ème édition du marché de Saignelégier est placée sous le signe des oiseaux et de la biodiversité. Rencontre avec sa présidente Lina Dubied.


Lina Dubied, le traditionnel marché bio de Saignelégier - dont vous êtes une des chevilles ouvrières - aura lieu dans quelques jours. Qu’est-ce qu’on y trouvera ? 

Les exposants locaux et régionaux sont privilégiés : ils représentent plus du tiers des 110 exposants. Parmi les produits présentés, une grande diversité de fromages de vache, chèvre et brebis, de viandes et de salaisons, mais aussi de fruits et légumes, farines, légumineuses et produits transformés, des conserves aux pâtisseries et à la petite restauration à l’emporter. Nous aurons aussi des vignerons, suisses et jurassiens. Précisons que l’entrée est gratuite: nous préférons que l’argent aille aux producteurs eux-mêmes…

Et en dehors des denrées alimentaires?

A l’alimentation s’ajoutent des artisans avec un espace dédié à la construction écologique ou des cosmétiques naturels.


Quel est le thème de cette 31e édition ?

Elle est dédiée aux oiseaux. Chaque année, nous décidons d’un accent particulier et cette année, nous avons choisi d’évoquer la biodiversité et les menaces sur de nombreuses espèces, en partant de l’idée que l’agriculture biologique a un rôle à jouer et peut agir concrètement en faveur de la biodiversité. Les oiseaux sont les premiers menacés par une agriculture intensive et les études démontrent le rôle positif de l’agriculture bio sur la présence de certaines espèces fragilisées, telles l’alouette ou la perdrix. On sait que ces oiseaux rendent des services à nos producteurs en se nourrissant de nuisibles et en contribuant à la pollinisation, en plus de leur beauté et de leur chant. Plusieurs ONG, telle Birdlife Suisse, participent au marché à travers différentes animations et conférences.


C’est une manifestation d’ampleur pour la région ; qui sont les organisateurs ?

Je suis présidente du comité d’organisation pour la douzième année : nous sommes un comité de 7 membres élargi à un collectif de soutien d’une vingtaine de personnes et pouvons compter sur l’aide précieuse de 150 bénévoles pendant le marché.

Votre papa est Bernard Froidevaux, fromager bien connu sous le nom de Lafleur pour sa croisade en faveur de la tête de moine artisanale, entre autres. Vous êtes vous-mêmes une activiste du bio depuis toujours, venant d’une famille engagée… 

Mes parents sont très militants, ils m’ont transmis cette fibre, même si elle s’exprime différemment. Mon papa a lui-même été président du marché bio durant plusieurs années. C’est vrai, je suis tombée dedans toute petite…

Le Jura est une région particulièrement dynamique sur le plan de l’agriculture biologique, pour quelles raisons ?

Le Jura est un pionnier du bio et le marché y est pour beaucoup. Il a stimulé la vente directe et la création de produits, on s’est rendu compte que la clientèle était bien là, le reste de l’année aussi. Tout s’est fait dans un esprit solidaire avec beaucoup de bénévoles : les agriculteurs viennent aider à monter les stands et y trouvent une formidable opportunité pour échanger. Ca a créé une vraie dynamique de groupe, une belle énergie. Bio Jura a lancé d’autres événements et une commission s’est fixé des objectifs précis: 15% d’exploitations bios en 2015 et 20% d’ici 2020.


Historiquement, comment est né le marché bio, un des plus anciens de Suisse, sinon le premier et comment s’est-il développé?

A l’origine, dans les années 80, il n’existait aucun commerce bio dans la région et les grandes surfaces n’avaient pas créé leurs propres marques. Seules quelques fermes pratiquaient la vente directe, mais c’était avant internet... Le premier marché a été créé conjointement par des producteurs et des consommateurs, comme une table ronde pour réfléchir et s’organiser en réseau. Ca a commencé par un petit marché dans une ferme avec une dizaine d’exposants, mais ca a bien pris: au bout de deux ans, il a fallu déménager à St-Ursanne et là, nous avons eu la chance d’avoir un bel article dans la presse bâloise, qui a drainé toute une clientèle alémanique. C’est parti en flèche et le marché a vite été à l’étroit : le cinquième s’est tenu à Saignelégier, puis sur deux jours, dès la dixième édition. Depuis, la croissance est continue : 10 000 visiteurs au bout de dix ans, puis 15 000. L’année dernière nous avons eu 24 000 visiteurs malgré une météo horrible, mais d’autres années, l’affluence a dépassé les 30 000 visiteurs. C’était très alémanique au début mais depuis quelques années, les Romands se sont réveillés et viennent de plus en plus nombreux.

Comment a évolué cette clientèle ? 

Nous avons depuis le début une clientèle fidèle et acquise mais chaque année voit aussi l’arrivée de nouveaux publics, curieux, intéressés. Je constate que les visiteurs sont plus en plus avertis, mieux informés, notamment à l’égard des labels.

Vous avez aussi une expérience et une vision de l’intérieur de ce marché, puisque vous avez créé votre propre magasin bio depuis une dizaine d’années et y avez ajouté, plus récemment, un des rares restaurants labellisés Cuisine Bourgeon de Suisse…

J’ai commencé par créer le magasin de produits bio et régionaux avec un petit bar en 2007, dans la ferme familiale de Montfaucon, datant des XVII-XVIIIe siècles. La plupart de nos fournisseurs se trouvent dans un rayon d’une dizaine de kilomètres, c’est une richesse formidable et c’est aussi en partie le réseau qui fait vivre le marché : fromages, œufs, pâtes, sirops, beurre de fromagerie, miels et confitures, saucisses sèches et bières de la Brasserie des Franches-Montagnes. Ainsi que quelques produits importés tels le thé ou le chocolat quand on ne trouve pas ici l’équivalent… A l’origine, j’ai fait l’Ecole hôtelière de Genève et je rêvais depuis toujours d’ouvrir un restaurant. J’ai eu l’opportunité de transformer le lieu en 2016 : le bio était dès lors une évidence, une philosophie privilégiant la vie et le naturel.



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1 commentaires

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